Pour de nombreuses personnes à Mons, la Trinité est le jour par excellence où Waudru, patronne de Mons, est fêtée.  Mais c’est là une erreur. Le fête de sainte Waudru, son dies natalis, est le 9 avril, jour de son décès. Ainsi, comme pour de nombreux saints, le jour de sa mort sur terre est devenu celui de sa naissance au ciel.

Fête de sainte Waudru, le 9 avril, dans un ouvrage de 1702 conservé au Trésor de la collégiale.

La fête du 9 avril était la plus solennisée des quatre fêtes dédiées à Waudru (3 février, 9 avril, 12 août et 2 novembre).

Ainsi, les statuts de la confrérie de Sainte-Waudru établie en 1610 précisaient : « Que les confrères et consœurs au jour de la principale feste et solemnité de Ste Wauldru, qui se célèbre le noefviesme d’apvril, se trouveront en ladite église, assisteront au St service divin et accompaigneront, se confesseront et recevront leur créateur avecq toute piété et dévotion, comme ilz feront aussy ès trois autres festes et solemnitez qui se célèbrent annuellement en ladite église à l’honneur de ladite saincte, aux processions ordinaires et solennelles ausquelz l’on est accoustumes de porter son corps sainct[1] ».

En 1743, l’archevêque de Cambrai érige une nouvelle confrérie de Sainte-Waudru (sans préciser ce qu’est devenue celle de 1610) dont les articles 10, 11 et 12 donnent des informations sur les fêtes de sainte Waudru auxquelles est jointe la fête de sainte Aye (soit les fêtes des deux premières saintes « montoises » dont les reliques étaient en procession, du temps du Chapitre, portées par un « Car d’Or ») :

« La fête principale de ladite confrérie sera le jour de la déposition de Ste Waudru.

Les quatre autres fêtes seront : le douze d’août, qui est la séparation du chef d’avec le corps de Ste Waudru ; le 2e de novembre, la canonisation ; le 3e février, la translation de ladite sainte, ainsi que le jour Ste Aye [18 avril], qui sont les cinq jours d’indulgence stipulés par la bulle de notre St Père le pape. Les confrères et consœurs devront assister aux offices qui se feront ainsi qu’aux processions avec flambeaux et luminaires.

Lesdits confrères accompagneront aussi diligemment avec modestie le corps de Ste Waudru à la procession qui se fait le jour de la Trinité[2] ».

Le reliquaire du chef de sainte Waudru couronné de roses rouges pour la Ducasse de 2018.

La confrérie, relancée en 1894 par l’évêque de Tournai, est dotée de statuts qui n’évoquent plus les fêtes de sainte Waudru mais mettent en évidence d’autres éléments. Ainsi, il est, entre autres, clairement écrit que le curé-doyen de Sainte-Waudru est le directeur de la confrérie, qu’il doit tenir les registres des associés et qu’il délivre les billets d’agrégation. Un article précise à quoi les dons doivent servir : « Le produit des offrandes volontaires des associés et du tronc placé dans la chapelle dédiée à Sainte-Waudru sera employé à l’ornementation de cette chapelle et à la célébration d’offices religieux à l’intention de tous les membres de la Confrérie. Ceux-ci sont tout spécialement invités à assister à ces offices[3] ».

En 1942, un groupe de personnes « d’œuvres encouragées par le haut appui de Monseigneur le Prince Ferdinand de Croÿ, curé-doyen de Ste Waudru, se réunit au presbytère pour jeter les bases d’un renouveau pour l’antique confrérie[4] ». Le constat sur l’état de la confrérie était net : « Après la guerre de 1914-18, la Confrérie avait retrouvé un semblant de vitalité, qui consistait à percevoir annuellement la cotisation modique de quatre douzaine de membres ; à la mort de l’un de ceux-ci, trois messes étaient dites. A la fête de Ste Waudru, le clergé s’ingéniait à solenniser, comme il convient, cette fête religieuse, mais les offices étaient suivis par quelques dévots qui étaient les grands habitués de la collégiale[5] ».

La fête de sainte Waudru fut très suivies de 1942 à 1945.  En 1945, le secrétaire de la confrérie note dans son registre : « En avril 1945, la Confrérie de Sainte-Waudru célébra dignement la fête de la sainte fondatrice de Mons ; il y eut Salut solennel le dimanche précédent la fête. Belle assistance ainsi que le jour même de la fête. Beaucoup de nouvelles inscriptions dans la Confrérie[6] ».

Ensuite, la Confrérie a, peu à peu, disparu, notamment parce que la Procession de la Trinité, qui était anciennement organisée par la confrérie, fut prise en charge par le Comité de la Procession[7].

Mais les fidèles de sainte Waudru n’ont jamais abandonné leur Patronne.

Ainsi, dans la collégiale Sainte-Waudru, au XXIe siècle, rendre hommage à la patronne de la cité montoise est aisément possible toute l’année devant le reliquaire du Chef (tête) réalisé en 1867 par l’orfèvre Bourdon.  La châsse (orfèvre Wilmotte en 1887) contenant le reste de son corps est directement accessible une semaine par an seulement à l’occasion de la Ducasse de la Trinité.

Le parentage de sainte Waudru, bois, 1577, chapelle 23 de la collégiale. ©Vincent Rousseau

C’est donc davantage vers la chapelle du Chef que les fidèles de sainte Waudru se tournent au fil de l’année.  C’est aussi dans cette chapelle que se trouvent un tableau intitulé « LE PARENTAGE STE WAVLDRUD COMTESSE DE HAINAVLT – ANNO 1577 NONA APRILIS », les restes d’une imposante statue de Waudru et ses filles du XVIIIe, et, depuis 2021, une icône contemporaine présentant « Waudru patronne de la cité ».

La châsse de sainte Waudru exposée temporairement dans le chœur de la collégiale en mai 2021, avant d’être déposée à la vénération populaire à la croisée du transept.

Le samedi 9 avril 2022 (80 ans après la dernière tentative de restauration de la Confrérie), la fête de la patronne de Mons sera solennisée en la collégiale.  Le reliquaire du chef, escorté de quatre chanoinesses (rappel des quatre aînées) et de hallebardiers, sera porté en procession vers le chœur.  Une prière sera lue et des litanies seront chantées quand le chef aura rejoint la châsse qui ne sera pas descendue (la fête de sainte Waudru n’étant pas et ne devant pas être une « pré-descente de châsse »).

Cette cérémonie en hommage à Waudru, liée chaque fois que ce sera possible avec la célébration d’une messe, est appelée à se répéter chaque année grâce à la collaboration entre le Doyen de la collégiale, la Fabrique d’église, les organistes et chantres, la Procession du Car d’Or, la Compagnie des Hallebardiers et le Conservateur.

 

Benoît Van Caenegem, Conservateur de la Collégiale Sainte-Waudru et de son Trésor

 

[1] Matthieu E., La confrérie de Sainte-Waudru à Mons, notice historique, Mons, 1898, p. 13-14.
[2] Idem, p. 8.
[3] Histoire populaire de Sainte Waudru. Patronne et Fondatrice de Mons. Sa vie et son Culte, Mons, 1904, p. 19.
[4] Mons. Confrérie de Sainte-Waudru. Registre des Procès-verbaux des réunions du Conseil de la Confrérie, des assemblées des Confrères à la Collégiale de Ste Waudru et autres faits intéressant la dite Confrérie, collection privée, p. 1.
[5] Idem.
[6] Idem, p. 11.
[7] Dans les années 1980/1990, le Comité de la Procession du Car d’Or organisait, en collaboration avec la Fabrique de Sainte-Waudru, une messe le 9 avril, jour de la fête de sainte Waudru, avant sa réunion plénière. Au cours de cette messe, le souvenir des membres du Comité décédés depuis l’année précédente était évoqué (le Comité reprenait de la sorte la tradition du souvenir que pratiquait la Confrérie de Sainte-Waudru).