Comme chaque année, un Te Deum est chanté le 21 juillet en la collégiale Sainte-Waudru pour marquer la fête nationale belge. Une photographie du Roi Philippe est, à cette occasion, placée dans le chœur de l’édifice. Mais l’actuel souverain n’est pas le seul « présent » dans la collégiale.

Premier et plus ancien témoignage de la présence de souverains en Sainte-Waudru : le couvercle du sarcophage de la comtesse Alix de Namur, comtesse de Hainaut (elle était l’épouse de Baudouin IV, comte de Hainaut). La pierre, datée de 1169 (année du décès de la comtesse), se trouve à l’entrée du déambulatoire Sud, sur un socle de marbre installé en 1836.

Le futur Charles Quint, suivi de son frère Ferdinand, sur la verrière de l’apparition du Christ à sa Mère (vers 1510/1511) ©Vincent Rousseau.

Philippe le Beau sur la verrière de la Crucifixion (1510/1511) ©Vincent Rousseau.

L’empereur Maximilien sur la verrière de la Crucifixion (1510/1511) ©Vincent Rousseau.

Puis, il faut lever les yeux. Dans les cinq verrières du chœur, dites « impériales » (vers 1510/1511), sont représentés l’Empereur Maximilien d’Autriche, son fils Philippe le Beau, ses petits-fils Charles et Ferdinand. Maximilien et Philippe y sont représentés deux fois (verrière de la Crucifixion et celle du Christ retrouvé au Temple par ses parents) ; Philippe apparait également sur la verrière de l’apparition du Christ à sa Mère en compagnie de ses fils Charles (futur Charles-Quint) et Ferdinand.

Les femmes de la famille (dont les fonctions « politiques » furent importantes) sont représentées sur les verrières de la fuite en Egypte (Marie de Bourgogne et Marguerite d’Autriche) et de l’Ascension (Jeanne de Castille et ses filles Eléonore, Elisabeth, Marie et Catherine)[1].

Ces verrières permettaient une présentation détaillée et imagée de la famille souveraine aux chanoinesses et, à l’époque, de déjà mettre en évidence celui qui deviendra, en 1515, comte de Hainaut et abbé laïc du chapitre : le futur Charles-Quint.

La sœur de ce dernier est vraisemblablement représentée par Jacques Du Broeucq dans le relief présenté depuis 1926 en un « tableau d’autel mal recomposé alors » : visite par Marie de Hongrie des travaux de construction d’un château » (sauf si ce relief, ce qui est peu probable, représente sainte Waudru comme on le lit parfois).

Au début du XVIIe siècle, les archiducs Albert et Isabelle laisseront des marques de leur attachement à la collégiale.  Ainsi, dès 1610, ils autorisent les orfèvres montois à apposer sur leurs travaux un poinçon qui est un AE couronné, soit le monogramme couronné des archiducs.

Neuf ans plus tard, les mêmes archiducs offrent une somme importante (dix mille florins) pour continuer les travaux d’élévation de la tour de Sainte-Waudru. Une pierre (toujours visible sur le contrefort Nord-Ouest) est posée par le duc d’Aumale au nom des archiducs et porte les blasons d’Albert et Isabelle ainsi que la date 1619.

Poinçon « Monogramme des archiducs Albert et Isabelle » sur un calice du Trésor de la collégiale

Un souverain belge est présent en permanence dans le patrimoine de la collégiale. Dans les verrières[2] offertes au prince Ferdinand de Croÿ[3] pour ses 25 ans de présence comme doyen à Mons, dans la lancette du centre, on voit une représentation du Roi Albert Ier [4], qui était alors Roi des Belges et auréolé du prestige de son action durant la première guerre mondiale. Le Roi est représenté assistant à un chapitre de la Toison d’Or (évocation probable du chapitre qui s’est déroulé en Sainte-Waudru en 1451[5]).

 

Sceau de Marguerite de Constantinople sur le parchemin de 1250 relatant la séparation de la tête et du corps de sainte Waudru (Trésor de la collégiale).

Une autre « souveraine », alors comtesse de Hainaut, est aussi présente dans le patrimoine waldétrudien : Marguerite de Constantinople. On conserve au Trésor une charte de 1250 relatant la séparation du Corps et du Chef (tête) de sainte Waudru. Un des sceaux attaché à l’acte sur parchemin est celui de Marguerite de Constantinople.  Cette dernière avait également offert le reliquaire qui a abrité la tête de la patronne montoise de 1250 à 1794. De ce reliquaire, rien ne subsiste.

Le livre d’or de la collégiale (repris dans l’inventaire du Trésor) conserve, quant à lui, des souvenirs graphiques (des signatures[6]) du passage par la collégiale de souverains ou de membres de la famille royale de Belgique depuis 1949 (date de création du livre d’or) :

  • La Reine Élisabeth (21 décembre 1952 – Bénédiction des orgues) ;
  • Le Roi Baudouin (17 mai 1953 – Joyeuse entrée) ;
  • Le Prince Albert, prince de liège (3 juin 1956 – Baptême de la cloche Marguerite) ;
  • Le Prince Philippe (21 juillet 1990 – Te Deum de la fête nationale) ;
  • La Reine Paola (11 mars 1996 – Visite de la collégiale centrée sur les verrières, les œuvres de Du Broeucq et le Trésor) ;
  • La Princesse Astrid et le Prince Lorenz (7 juin 1998 – Ils assistent à la montée du Car d’Or depuis le parvis Nord de de la collégiale) ;
  • Le Roi Albert et la Reine Paola (11 juin 2006 – Fin de la procession, montée du Car d’Or, dépose de la châsse et « vénération » de la châsse) ;
  • Le Prince Laurent et la Princesse Claire (21 juillet 2009 – Te Deum de la fête nationale) ;
  • Le Roi Philippe et la Reine Mathilde (24 janvier 2015 – Séance inaugurale de Mons 2015, Capitale européenne de la Culture) ;
  • Le Prince Laurent et la Princesse Claire (21 juillet 2015 – Te Deum de la fête nationale) ;
  • La Princesse Léa (23 août 2015 – Messe à l’occasion du 80e anniversaire du décès de la Reine Astrid) ;
  • Le Prince Laurent (21 juillet 2021 – Te Deum de la fête nationale).

Au niveau supra national (la notion de souveraineté est alors bien « différente »), il faut également noter que le livre d’or de la collégiale conserve la signature de M. Herman Van Rompuy, premier Président du Conseil européen (30 mai 2010 – Fin de la procession, montée du Car d’Or et dépose de la châsse).

Au fil de l’Histoire, d’autres souverains ont découvert la collégiale mais l’édifice montois, ses collections et ses archives n’en conservent pas de traces iconographiques et / ou graphiques.  Seuls quelques livres et / ou journaux en conservent une trace qui, désormais, se découvre un peu par hasard selon le regard des chercheurs qui les lisent…

Benoît Van Caenegem, Conservateur de la collégiale Sainte-Waudru  et de son Trésor

————————————————

[1] Maximilien (1459-1519 – empereur de 1508 à 1519) ; Philippe le Beau (1478-1506), Marie de Bourgogne (1457-1482, épouse Maximilien en 1477) ; Marguerite d’Autriche (1480-1530 – fille de Maximilien), Charles (1500-1558 – empereur Charles Quint de 1519 à 1556), Ferdinand (1503-1564 – empereur de 1556 à 1564 – frère de Charles Quint) ; Jeanne de Castille (1479-1555 – épouse de Philippe le Beau et mère de Charles Quint) et ses filles Eléonore (1498-1558) ; Elisabeth (1501-1526) ; Marie (de Hongrie – 1505-1558) et Catherine (1507-1578).

[2] Ces verrières sont réalisées sur base de dessin du chanoine Edmond Puissant, alors membre du Conseil de Fabrique et conservateur de la collégiale.

[3] Né au Roeulx en 1867 et décédé à Louvain en 1958, le prince Ferdinand de Croÿ fut doyen de Sainte-Waudru de 1905 à 1946.

[4] Le Roi Albert 1er est né le 8 avril 1875 et est décédé le 17 février 1934.  Il règne du 23 décembre 1909 au 17 février 1934.

[5] Probablement dans la collégiale romane qui n’était pas encore démolie.

[6] Des trois dernières reines des Belges, seule la signature de la Reine Fabiola manque car elle n’est jamais venue visiter la collégiale ni y assister à une cérémonie religieuse, officielle ou culturelle.